Le début de cette réflexion se situe après la table ronde « le GN est-il le 11ème art[1] ? » initiée par Daniel Bonvoisin lors des GNiales 2010. Cette thématique provocatrice, jetée en pâture à un public en folie par notre sympathique voisin belge, a été l’occasion de discussions animées desquelles 80% des personnes impliquées m’ont paru en ressortir le sourire aux lèvres, la fleur au fusil et investies de la mission divine de défendre cet Art à part entière, atypique, méconnu et évidemment sous-estimé par le commun des mortels que sont les non-pratiquants du jeu de rôle Grandeur Nature.
Si l’intention première de Daniel était de pointer du doigt la nécessité pour la communauté française de faire les mêmes démarches auprès du ministère de la Culture que celles enclenchées par la fédération belge quant à l’inscription de notre loisir au patrimoine culturel immatériel de l’Humanité, elle a eu aussi le mérite de nous montrer à tous combien c’était un sujet sensible, porteur d’affects et de convictions bien ancrées.
Cette approche Hégélienne[2] de notre loisir nous fait nous questionner sur le rapport du jeu de rôle grandeur nature avec les activités dites artistiques et avec plus généralement l’Art avec un grand A. Si certains voient des rapports évidents et parfois même fusionnels, d’autres pensent qu’il faut distinguer deux entités bien différenciées. Quels sont les enjeux ici et les forces en présence.
Hautes définitions :
Si j’ai eu l’occasion d’essayer de définir les contours de l’activité GN à partir de plusieurs définitions (FédéGN, GN de merde), il est cependant important ici de différencier un certains nombre d’éléments souvent assimilés et regroupés par abus de langage. Dans la formule le « GN est-il le 11ème art ? », qu’est-ce que qui est en jeu sous le vocable GN ? Est-ce le GN en tant que loisir ? Dans ce cas-là il serait sur le même plan que la belote ou le macramé. Est-ce le GN comme média ludique ? Porteur de messages qu’ils soient parfois éducatifs et politiques comme chez nos amis scandinaves[3] ou purement narratifs ? Est-ce le GN en tant qu’événement, cadre ludique, construit par les organisateurs et investi par les joueurs ? En s’appuyant sur les travaux de Bateson[4] cités par Olivier Caïra[5], on admettra que le jeu dont on parle (le GN) « n’est pas le nom d’un acte ou d’une action, c’est le cadre où se situe l’action ». C’est la double nature de ce cadre, à la fois ludique (indiscutable celle-là) et artistique, qui est questionnée ici.
Définir ce qu’est l’Art est nettement plus complexe. Heureusement que dans des cas critiques comme celui-ci, il y a notre bon ami le Larousse. À la rubrique Art il est précisé, parmi quatre autres possibilités, que l’Art est la « création d’objets ou de mises en scènes spécifiques destinées à produire chez l’homme un état particulier de sensibilité, plus ou moins lié au plaisir esthétique[6] ». On ne rebondira pas plus sur les définitions car alourdir le texte avec Aristote et d’autres potes à lui ne serait pas tip top déjà que le sujet en soit n’est pas des plus sexy et que j’ai déjà perdu la moitié des hypothétiques lecteurs attirés par la jeune femme dénudée que notre cher rédacteur en chef ne manque jamais de mettre en couverture de mes articles… Bref. L’idée principale de l’Art étant pour faire simple (et encourir les foudres des éventuels professeurs de philosophie ou d’esthétique médiévale du 12ème siècle) la volonté de créer une émotion, une réflexion, une réaction face à une œuvre possédant une valeur esthétique intrinsèque (rapport à la beauté perçue / reconnue).
Équipés de ces pistes, explorons les rapports entre ces deux entités.
Le GN et l’Art
On peut noter que le champ lexical du GN comprend un certain nombre de termes en commun avec des Arts reconnus. En effet, on parle de scénario, de scènes, de jeu (d’acteur ?), de rôles à appréhender, de personnage à jouer. D’autre part, ce sont des populations (pratiquants du GN, intermittents du spectacle, artistes…) qui se côtoient, se croisent, partagent et échangent beaucoup sur leurs hobbies pour certains, métiers pour d’autres. Beaucoup sont bi voir tri-classés et enrichissent une de leurs pratiques en piochant dans le répertoire des autres.
« L’Art doit être rapproché du Jeu : c’est un libre jeu avec les sensations, les sentiments, les idées. Tous deux vivent de fictions, de conventions, et se désintéressent des valeurs pratiques[7] ». Intégrant le GN dans « la grande famille » des jeux, il est ainsi possible d’identifier dans un premier temps 3 éléments communs entre Art et GN.
Tout d’abord, c’est la fiction. Qui à la fois nourrit, sert de support et parfois demeure une des finalités du GN. J’entends ici la fiction dans sa déclinaison du latin fingere dont une des traductions possible est « faire semblant ». Lorsque nous jouons nous faisons semblant, nous sommes ici et là, mais en fait c’est le personnage que nous interprétons qui se trouve dans un contexte propre au jeu. Nous suspendons volontairement notre incrédulité[8] le temps du GN pour vivre et faire vivre une histoire initiée par les organisateurs.
Ensuite, de même qu’il y a des conventions, des règles dans le théâtre classique, dans la musique, la poésie, la peinture ; les GN, quels qu’ils soient, sont tous régis par un rapport aux règles. Aussi minimes ou conséquentes soient telles, ces règles permettent à tous les participants d’interagir entre eux et avec l’environnement. De comprendre et de se faire comprendre.
Le troisième élément commun est la notion de libre jeu. Si aucun jeu n’est totalement libre à mon sens, il est possible d’identifier dans un GN le degré de liberté donné aux joueurs en termes d’interprétation du personnage, d’impact sur son environnement et sur le bon déroulement du GN. Cela peut aller d’un GN très dirigiste avec des rendez-vous incontournables et chronométrés à des jeux très ouverts où beaucoup de choses dépendent des seules réalisations et envies des joueurs.
Je ne disserterai pas sur le désintéressement de ce que Guillaume nomme « les valeurs pratiques » je ne peux qu’émettre une hypothèse en rapprochant cette notion de celle « d’improductivité » du jeu notée par Caillois[9]. On peut toutefois noter que ce rapprochement fait dans une perspective psychologique met en lumière certaines similitudes entre les deux activités. Tout d’abord le fait que toutes deux s’alimentent de fictions, d’histoires. Quelque chose est dit, raconté, montré. Quelque chose à la fois ancré dans la réalité mais légèrement décalé, hors du cadre[10] de tous les jours. Autre élément commun, les conventions existantes au sein de l’Art et du Grandeur nature. Si elles fluctuent en fonction des sensibilités, des courants et des populations, ces conventions, règles, régissent les rapports et permettent le dialogue avec l’autre.
Un autre point commun pourrait être trouvé selon moi entre le jeu en général et l’Art. Si, pour Wallon, le jeu est une réalisation qui ne vise qu’à la seule réalisation de soi[11], il se retrouverait donc quelque part dénaturé si on faisait porter sur ses épaules des intentions autres que le simple fait de jouer. Ce point de vue pourrait à mon sens, être assimilé à celui de Théophile Gautier concernant l’Art lorsque celui-ci prône l’Art pour l’Art[12]. Il n’a pas à être utile ou porter quelques valeurs ou vertus, la seule chose qui compte pour l’artiste et d’avoir une visée esthétique (création du beau). Or il est facilement identifiable pour le Jeu comme pour l’Art, que certains « détournements » ont eu lieu durant l’Histoire. Le jeu, et les activités qui lui sont rattachées, ont été utilisés par différentes institutions, qu’elles soient politiques, éducatives, médicales, militaires, économiques ou autre, pour leurs propres desseins dans des buts d’endoctrinement[13], thérapeutiques[14] ou de formation des masses. En ce qui concerne plus précisément le GN, quelques associations (tout particulièrement des scandinaves, mais pas que…) ont clairement mis en avant la nature et l’importance du message porté par leur GN. Les sujets abordés étant essentiellement politiques[15][16] Et l’Art, de son côté, a été utilisé par les artistes eux-mêmes pour exprimer leur opinion avec des messages religieux, politiques, subversifs dépassant nettement le cadre de la recherche du « beau ». À noter que c’est aussi et parfois même surtout les pouvoirs en place[17] qui ont détourné l’intérêt des foules pour l’Art à des fins de propagande.
Certaines équipes organisatrices de GN affichent l’intention, tout comme certains arts, de raconter une histoire avec des techniques inspirées de ces arts, mais au final retravaillées et adaptées aux spécificités de ce loisir. Là où le cinéma et la littérature donnent à leurs spectateurs / lecteurs des fictions écrites, fixes, le joueur de grandeur nature se voit offrir un cadre fictionnel[18] dans lequel il va pouvoir impacter.
Si le Grandeur Nature et l’Art ont des points communs, ils ne peuvent pas être assimilés et en aucun cas, du moins de mon point de vue, un Grandeur Nature ne sera une œuvre d’art. Un grandeur nature peut avoir des qualités esthétiques indéniables mais c’est avant tout un objet ludique.
Il y a, dans une œuvre d’art, une cohérence, une unité qui n’existe pas dans un GN. Un GN est une multitude d’événements, qui même s’ils ont une certaine cohérence, ne peut aspirer au titre d’œuvre d’art. Ils ne peuvent pas être pensés, anticipés et mis en scène par les organisateurs. Il y a là en ce sens quelques similitudes avec le Théâtre d’improvisation vis-à-vis du Théâtre.
Le GN et les activités artistiques ou l’Esthétique et le cadre ludique ?
Le beau au service du jeu, du réalisme, de l’immersion dans un univers donné.
Outre l’envie des joueurs et des organisateurs de se montrer sous leurs meilleurs profils (en particulier au niveau des costumes), un grandeur nature, selon la sensibilité des organisateurs, est souvent l’occasion de faire la part belle à un ou plusieurs arts. Certaines incursions artistiques peuvent être le support du jeu. Que ce soient la Danse, la Poésie, le Théâtre, la Peinture, et de manière moins classique mais tout aussi visuelle et surtout gustative, les arts culinaires qui au-delà de faire partie des incontournables qui peuvent transformer un GN sympathique en GN « mémorable » ; toutes ces activités peuvent être intégrées comme de véritables supports non seulement d’ambiance mais aussi d’intrigue (perte de goût, empoisonnement, rivalités, concours…).
Mais attention au piège du tout beau. Un GN très travaillé au niveau des costumes, des décors, de l’ambiance peut être beau sans consistance ludique. Quelle que soit la qualité visuelle, littéraire, historique d’un GN, s’il ne possède pas en lui les qualités ludiques nécessaires, le risque pour les participants est de devoir se cantonner à des rôles de figurants. C’est certainement une belle fresque digne d’une très belle reconstitution historique mais en aucun cas un jeu. Si écrire un GN à la manière de… est un exercice extrêmement difficile et très risqué, il n’en demeure que pour en avoir fait l’expérience en participant à l’Agonie du poète[19] que c’est une expérience vraiment exceptionnelle. Dans un jeu qui se veut, je cite, « l’héritier du théâtre et du roman, de Molière à Alexandre Dumas, de Cyrano de Bergerac à Scaramouche, du Capitaine Fracasse au Fantôme de l’Opéra » ; il est non seulement nécessaire de s’immerger dans ce type de littérature mais aussi de la pratiquer un minimum pour pouvoir saisir toute la pertinence de ce qui est donné à jouer. Je n’en dirais pas plus si ce n’est : inscrivez-vous vite, qui que vous soyez, d’où que vous veniez ; vous y trouverez à jouer.
La réalisation, mise en place de de ce cadre ludique qu’est le GN est plus à chercher selon moi du côté de l’Artisanat (ensemble de techniques spécifiques) plutôt que du côté de l’Art, et ce avec tout ce que cela implique de bricolage, de cambouis, d’essais / erreurs, peaufinage. On peut tout à fait selon moi participer à un beau / bon / super GN sans forcément invoquer « l’Art » comme on invoquerait un grand Ancien.
Conclusion :
Un beau GN n’est pas forcément celui qui a les plus beaux costumes ni le plus beau feu d’artifice. Et le « beau jeu » là-dedans ? Les belles émotions ? Qui sont éminemment subjectives, impalpables et quelque part non quantifiables. Cette discussion n’est pas sans rappeler tout à coup celle initiée sur le « bon joueur »[20]. Est-ce que « l’avenir » du GN est pour autant dans la surenchère émotionnelle, avec de « belles » scènes etc ? Non, je ne le pense pas forcément. Le trop est l’ennemi du bien, et faire l’effort de donner à jouer juste me semble préférable à une débauche de moyens tape à l’œil.
Différencier un objet artistique d’un objet ludique me paraît fondamental. Ces deux entités ont, à la base, des caractéristiques et des buts différents. Pour certaines activités ludiques il est possible que l’objet ludique soit en même temps un objet artistique. L’existence de Musées (Musée Français de la carte à jouer, Musée du jeu vidéo) et d’expositions dédiées (Art du jeu, jeu dans l’Art[21] ; Jeux de princes, jeux de vilains[22]…) nous laissent penser que certains jeux (en tant qu’objets) peuvent dans une certaine mesure être vus, pensés, analysés dans une perspective muséale et artistique. La diversité des facettes, l’intangibilité et les caractéristiques intrinsèques du Jeu de rôle Grandeur Nature empêche, à mon sens, celui de prétendre à cette double casquette.
Enfin il me semble important de souligner que de la même manière que la culture artistique se travaille, qu’il est possible de « s’outiller » tant au niveau du regard que de l’esprit critique autour des œuvres artistiques quelles qu’elles soient ; la culture GNistique est selon moi, elle aussi, le fruit d’un processus cumulatif de l’acquis. Pour pouvoir apprécier un GN, en déceler les richesses, les intentions, les faiblesses et les forces, il est nécessaire d’avoir pratiqué pas mal, d’avoir bourlingué un peu, d’avoir discuté beaucoup en France et en Navarre. Toutes ces réflexions, ces expériences, pourraient être rassemblées sous le concept d« habitus du GNiste cultivé ». L’habitus est un concept issu du champ de la sociologie, particulièrement travaillé par Bourdieu[23], et qui désigne des manières d’êtres ou des connaissances partagées par un même groupe social, elles sont acquises et transmises. Cet ensemble d’informations, de sensations, de réflexions construit par chacun nous sert de base à « l’évaluation » (qu’elle soit esthétique, ludique etc…). S’il est une aide indiscutable, c’est un référentiel qui doit être ouvert à la déconstruction, à la remise en cause lors de chaque nouvelle expérience GNistique, à chaque baffe ludique que nous rêvons de prendre au détour d’un des chemins de traverses que nous empruntons quelques week-ends par an.
N.B. :
Ces quelques mots attendent depuis fort longtemps.
D’aucuns de mes amis m’ont dit sois patient.
Attends d’avoir vécu l’Agonie du Poète
Pour l’Art et du GN disserter à tue-tête
Qu’ils en soient ici remerciés.
[2]Hegel G. W. F., Cours d’esthétique, Introduction et première partie, Tome I, trad. J-P. Lefebvre et V. Von Schenck, Aubier, Paris, 1995 – 1997.
[4] Bateson G., La Nature et la Pensée, Eds du Seuil, Paris, 1988.
[5] Caïra O., Jeux de rôles, les forges de la fiction, CNRS éditions, Paris, 2007.
[7] Guillaume P., Manuel de Psychologie, Presses Universitaires de France, Paris, 1948.
[8] Coleridge S. T., Biographia, Literaria or biographical sketches of my literary life and opinions, 1817, Chap XIV.
[9] Caillois R., Les jeux et les hommes, Gallimard, Folio Essais n°184, Paris, 1967, p.10.
[10] Goffman E., Les cadres de l’expérience, Les éditions de minuit, Paris, 1991.
[11] Wallon H., L’évolution psychologique de l’enfant, A. Colin, Paris, 1941
[12] Gautier T., Préface de Mademoiselle Maupin, Editions Eugène Randuel, Paris, 1835.
[13] Gay-Lescot, J-L., Sport et éducation sous Vichy (1940-1944), Presses universitaires de Lyon, Lyon, 1991.
[14] Winnicott, D.W., Jeu et réalité, l’espace potentiel. 1971, Editions Gallimard, Paris, Trad. 1975.
[16] Kaljonen J-P., Raekallio J., Dublin2, the EU’s asylum policy in miniature, In States of Play, Danemark, 2012.
[17] Genty T., Art et subversion, deux pôles antagonistes, Mémoire de DEA, 1999.
[18] Sebatien Kapp, Jeux de rôles grandeur nature : fictions ludiques ou jeux fictionnels ? Thèse à paraître.
[21] Musée de Cluny (Novembre 2012 / Mars 2013).
[22] Bibliothèque Nationale de France / Bibliothèque de l’Arsenal (Mars / Juin 209).
[23] Bourdieu P., Esquisse d’une théorie de la pratique, Droz, Genève, 1972.
Crédits photos :
Olivier Girard, L’origine du monstre, http://www.originedumonstre.com/ GN Marcheurs de l’Avant 2013
Renaud Chaput : Poudlard 1920. 3eme session.
David Arzailler
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23 octobre 2013 at 8 h 59 min
Un article touffu mais intéressant 🙂
23 octobre 2013 at 9 h 45 min
Le début ne partait pas mal, mais je ne suis pas du tout convaincue par ton argumentation (ton absence d’argumentation plutôt) et les liens que tu trouves entre GN et art me paraissent peu pertinents.
Je ne vais pas développer davantage dans les commentaires car je prépare un article en réponse à celui-là qui devrait être publié d’ici une semaine.
23 octobre 2013 at 11 h 08 min
Je vous en prie… pas de soucis. Open fire. Je sais qu’il y a bon nombre de personnes ayant une opinion diamétralement opposée.
Pour moi le GN doit rester à tout prix un jeu et toute envie et perspective de rapprochement avec une oeuvre d’art me donne de l’urticaire 🙂 et je préfèrerai toujours les bons GN faits de bric et broc avec du jeu à des objets artistiques à caractère ludique pauvres du point de vue du jeu. Je n’ai pas eu la chance de participer à tous les GNs de la Création, mais en me basant sur ma modeste expérience, seule l’Agonie combine efficacement les deux aspects. Concernant le GN comme média , idem, cela me donne de l’urticaire. Cela me donne l’impression qu’à l’insu de mon plein gré on essaie de me faire passer un message… Mais qui décide de la portée morale du message? Les orgas seuls? Est ce que je dois leur faire confiance moralement aussi? pourquoi me l’impose t on ? Au nom de quelle idéologie?
Concernant l’argumentaire oui, je le concède je ne suis pas allé assez loin peut être dans le “on ne mélange pas les torchons et les serviettes” ou alors le gars qui mélange doit avoir de sérieux arguments et compétences.
Mais je peux tout à fait concevoir et comprendre que certains pensent viscéralement le contraire. Si ces quelques lignes les poussent à la discussion c’est une bonne chose.
Après la compréhension s’arrête aux limites de l’expériences, et si on me propose de manière régulière des GN fabuleux artistiquement et ludiquement … ma foi, il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis 🙂
Dernière chose, quel que soit le contexte, je ne me considère que comme un modeste joueurs et organisateur de huis clos, je ne suis pas et ne serais JAMAIS un écrivain, un acteur, un dessinateur, un sculpteur ou un musicien. J’ai bien trop de respect pour ces activités.
24 octobre 2013 at 12 h 20 min
Ne vous inquiétez pas monsieur Arzailler, il ne sert à rien de sacraliser les professions artistiques et en faire partie n’immunise pas contre la bêtise. D’ailleurs de nos jours, le moindre plébéiens peut s’autoproclamer, et a juste titre, artiste.
Je poserai une question simple : Quel est l’intérêt pragmatique de vouloir définir l’art et de vouloir intégrer les activités de gn dans la définition.
En gros en quoi cette réflexion pourra permettre une plus-value ou une meilleure compréhension de notre activité ?
Vu que j’ai droit à ouvrir le feu, je vais exprimer sans retenue le fond de mes pensées.
“Il y a, dans une œuvre d’art, une cohérence, une unité qui n’existe pas dans un GN. Un GN est une multitude d’événements, qui même s’ils ont une certaine cohérence, ne peut aspirer au titre d’œuvre d’art. Ils ne peuvent pas être pensés, anticipés et mis en scène par les organisateurs. Il y a là en ce sens quelques similitudes avec le Théâtre d’improvisation vis-à-vis du Théâtre”
Une unité est toujours la somme de sous ensemble, je ne comprends pas pourquoi une oeuvre d’art devrait être plus cohérente qu’un gn, surtout si la création artistique se base sur des processus aléatoires. (Sisi ca existe)
Et si on suit cette logique, une pièce de théâtre ou les acteurs ont le droit de faire de l’impro n’est pas une oeuvre d’art. Et si le gn ne peut aspirer à être une oeuvre d’art, pim, le problème réglé, question suivante 😉
“Si écrire un GN à la manière de… est un exercice extrêmement difficile et très risqué, il n’en demeure que pour en avoir fait l’expérience en participant à l’Agonie du poète[19] que c’est une expérience vraiment exceptionnelle. .”
Gaffe, on pourrait croire que tu as participé à la création du scénario du pouet avec fredou vu la formulation.
“La réalisation, mise en place de de ce cadre ludique qu’est le GN est plus à chercher selon moi du côté de l’Artisanat (ensemble de techniques spécifiques) plutôt que du côté de l’Art, et ce, avec tout ce que cela implique de bricolage, de cambouis, d’essais / erreurs, peaufinage. On peut tout à fait selon moi participer à un beau / bon / super GN sans forcément invoquer « l’Art » comme on invoquerait un grand Ancien.”
Ah ben tient, les créations crée à partir de technique d’artisanat n’ont pas l’insigne honneur d’être considéré comme de l’art ? On peut bruler tous les catalogues d’art plastique et de sculpture/céramique alors.
“Différencier un objet artistique d’un objet ludique me paraît fondamental
Ces deux entités ont, à la base, des caractéristiques et des buts différents.”
Si on suit ta définition, le gn produit un état de sensibilité en réaction à une construction esthétique. (Plaisir de jouer), n’est ce pas la même fonction ?.
Je terminerai ce commentaire par ma propre définition de l’art et du jeu.
Une balle posée sur le sol n’est ni de l’art, ni une activité ludique, c’est un objet inerte.
Elle peut devenir de l’art si un observateur la regarde comme tel. (poser la sur un piédestal dans un musée et personne ne niera que c’est une oeuvre d’art.
Faites-la rebondir sur un mur en vous fixant des règles de jeu et vous créerez une activité ludique.
Et artistique si vous la faites rebondir devant des spectateurs dans un musée. Çà marche aussi avec du caca…
Bref, tout peut devenir art, tout peut devenir jeu…. Intéressons nous à améliorer l’aspect qualitatif de ceux-ci plutôt que de chercher à y coller des définitions.
25 octobre 2013 at 12 h 40 min
Brûler des livres???? Même si ce sont des catalogues d’art plastique!!! Jamais :). Par contre à mon sens, n’est pas Botticelli qui veut. Et les dessins de mon neveu de 5 ans ne sont que des dessins… ce ne sont pas une oeuvre d’Art quelle que soit l’affection que j’ai pour lui. Gribouiller quelques traits sur une page blanche ou taper sur des bambous ne suffit pas à mon sens pour être qualifié d’Artiste.
Mais j’ai peu être une vision trop sacralisée de ce qu’est (ou doit être peut être) l’Art. Je suis attaché à la cohérence d’un ballet, un morceau de musique, d’une pièce de théatre… Bien sur il y a d’autres activités laissant la part à l’improvisation, l’inattendu, l’imprévu, le facteur X… pour moi, le résultat peut rarement être rangé dans la case : Art. C’est artistique oui, mais de l’Art c’est autre chose. Mais disserter de ce qui est de l’Art et de ce qui n’en est pas est sans fin, casse gueule et d’autres que moi ont été bien plus pertinents sur le sujet. Chacun a son opinion forgé avec sa sensibilité, son éducation et son expérience propre et c’est très bien.
lorsque je vais participer à un GN, je regarde ce “truc” GN avant tout comme un jeu auquel je vais participer et en aucun cas comme une oeuvre d’art collective. Bien sûr, il est possible de se dire “je vais participer à un grand théâtre d’improvisation libre à ciel ouvert avec 10000 figurant et je vais jouer Mar Aurèle dans des décors de péplum avec mon super costume en jupette … et puis je vais me suicider dans mon auditoire fasciné et conquis en leur tirant une larme à l’oeil…”, moi ce n’est pas ma manière d’aborder un GN. Sans tomber dans du Gamisme basique bien entendu j’aime bien laisser la porte ouverte à tout. Je viens en tant que joueur avant tout en essayant d’être ouvert aux émotions et à tout ce qui fait la richesse de ce jeu.
En ce qui concerne l’Artisanat, je verrai plutôt l’organisateur de GN comme un plombier ou un mécanicien que comme un ébéniste ou un verrier. Mais cela n’enlève rien du tout aux compétences et au savoir faire de chacun. Pour moi la priorité (et je n’ai pas dit la seule chose importante) d’un GN, c’est qu’il fonctionne et que les joueurs aient à jouer, pas qu’il soit un coquille très très belle mais vide.
Quand à la balle. Je ne pense pas que le simple fait de la mettre dans un musée suffise pour la nimber de l’appellation non galvaudée d’oeuvre d’art. Et fixer des règles d’utilisation d’un objet ne suffit pas, à mon sens, à transformer une manipulation en activité ludique et encore moins à la qualifier de jeu. La règle, seule, ne suffit pas.
Améliorer l’aspect qualitatif oui bien sur, mais pour moi c’est l’aspect qualitatif du jeu qui prévaut. Une fois que le jeu est bien huilé, au top, que tout tourne bien, libre à chacun bien évidement de l’embellir au mieux esthétiquement.
25 octobre 2013 at 19 h 06 min
David nous propose ici une lecture bien savante, mais qui reflète néanmoins à peu près ma pensée sur cette question épineuse.
À mes yeux ce débat n’est qu’une double guerre de clochers : d’une part celle des différentes définitions possible de notre loisir, d’autre part celle beaucoup plus ancienne et beaucoup plus « courante » au sujet de la définition de l’art en en particulier de son opposition avec le beau (débat qu’on a déjà abordé de vive voix 😉 ).
Je pense en premier lieu à la tentative de classification des Arts, et en particulier l’émergence du concept vague d’Art « Mineur » qui en a découlé, qualifiant initialement les travaux d’artisanats effectués dans un « objectif » artistique, avant d’être détournés par des trolls plus talentueux que moi (Gainsbourg pour ne citer que lui). Ainsi, on pourrait prétendre que rapprocher le GN de l’artisanat (comme tu le fait ici) équivaudrait à en faire un art mineur tant que l’ « objectif » artistique est recherché par l’auteur, et reconnus par son public et/ou par ses pairs.
Cependant je suis parfaitement d’accord avec toi : À mes yeux, un GN est un objet dont le premier et principal objectif est la démarche ludique. C’est ainsi que je joue les jeux auquel je participe et que j’écris ceux que je scénarise. Dans ma vision la recherche artistique est un élément primordial, mais qui reste en second plan vis-à-vis du ludisme et ne devrais pas se faire au détriment du ludisme.
Je vais faire une analogie avec un Art « Mineur » selon la définition classique, par exemple la porcelaine. Il existe dans nos musées ou dans des collections privées des dizaines de milliers de théières en porcelaine considérés (la plus part du temps à juste titre) comme des œuvres d’art. Mais parmi ces théières combien sont réellement conçues et pensés pour remplir la fonction principale d’une théière c’est-à-dire faire infuser et servir le thé ? Combien sont employés à cet usage ? Les créateurs de ces objets, en mettant la recherche artistique au-dessus de l’aspect fonctionnel (par les formes, ou le choix des matériaux), ont souvent fait des choix qui rendaient l’usage « supposément » attendu de cet objet difficile si ce n’est impossible.
Oui, une théière en porcelaine peut être un objet d’art.
Mais peut-on utiliser cet objet d’art pour faire infuser et servir du thé ? Pas toujours.
De plus utilisation n’entraine beaucoup plus de « contrainte d’utilisation » qu’une théière acheté 5 euros chez Ikea.
En suivant la même idée, et toujours selon ma vision, en supposant qu’un GN puisse être un objet d’art, c’est-à-dire un objet pour lequel son concepteur à fait passer la recherche artistique avant la recherche ludique, il est possible qu’un tel GN ne remplisse plus sa « fonction principale ».
Et même si c’est le cas, il se peut que les contraintes sur la composante ludique imposée par la primauté de la démarche artistique l’entravent trop au détriment de sa jouabilité.
Après c’est ma vision toute personnelle du problème.
27 octobre 2013 at 9 h 17 min
Un article avec un titre aussi ambitieux que celui-ci devrait gagner en argumentation “scientifique” (exposer un probleme, des elements de reponse et une conclusion). Je ne comprend pas quel est le lien logique entre les faits que tu exposes au debut, et ta conclusion, qui m’a tout l’air d’etre une opinion personnelle. Chacun peut penser ce qu’il veut, mais quand on s’attaque a un theme comme celui la, un peu plus d’objectivite serait bienvenue. Desolee pour les accents je suis sous qwerty.
27 octobre 2013 at 9 h 48 min
je trouve ça triste de vouloir à ce point différencier l’activité artistique et l’activité ludique.
Tu cites la définition :
« création d’objets ou de mises en scènes spécifiques destinées à produire chez l’homme un état particulier de sensibilité, plus ou moins lié au plaisir esthétique[6] »
Pour moi, cela signifie qu’un GN créé avec l’intension de faire éprouver des émotions aux joueurs est une oeuvre d’art, tout simplement. Bien sûr, ça ne signifie pas qu’elle soit de qualité, ni qu’elle mérite d’être dans un musée et encore moins qu’on la compare à un chef-d’oeuvre. Je n’ai pas joué l’Agonie du poète, mais ça pourrait s’apparenter à un chef-d’oeuvre étant donné le parcours de l’auteur et la critique de ceux qui ont participé à ce jeu.
je trouve que tu confond souvent le fond et la forme d’un jeu dans ton article. l’ambition de l’organisateur peut être artistique pour son propre sens de l’esthétique et uniquement ludique pour ceux qui participe. La fonction d’un GN est forcément ludique, sinon ce n’est plus un JEU de rôle.
Pour différencier art et artisanat, je dirais que artisanat est un travail technique, tandis que l’art est un travail émotionnel.
Effectivement, il y a beaucoup de jeu qui ne cherchent pas la dimension émotionnelle.