L’association Wargs a écrit et organisé 3 GNs dans l’univers de Star Wars. La série des Jedi Knight, le 1, le 2 et le 3, devrait bientôt avoir un petit frère puisque l’épisode 4 est en préparation. Avant de vous perdre, il faut préciser que les GNs ne se suivent pas. En fait les personnages n’ont rien à voir entre eux, les époques sont différentes à chaque fois et en plus, malgré le titre, on ne joue pas toujours des Jedis.
Du 1er au 3 juillet 2011, l’association de Rhône Alpes remettait donc le couvert près de Chambéry avec la 4ème édition du 2ème opus de la série : Le Jedi Knight 2.4. Vous me suivez toujours ? Quatre éditions pour un même jeu, ça mérite d’être signalé. D’autant que la 3ème session avait été organisée en partenariat avec Rôle et Rêves de Licorne, ce qui signifie que c’est un GN, pour une quarantaine de personnages tout de même, qui a été passé à une autre association et organisé par des gens qui ne l’avaient pas écrit. C’est rarissime, car si vous pouvez trouver des scénarios prêts à jouer de murder-party (comme sur l’excellent www.murder-party.org), les scénarios de GN réorganisés ne sont pas légion et ceux qui sont suffisamment écrits pour pouvoir se transmettre se comptent sur les doigts de la main.
Le jeu devrait être réorganisé, et, si vous surveillez leur site, vous devriez pouvoir gratter une place un jour : www.wargs.org
Pourquoi est-ce que je m’embête à vous expliquer que le jeu a été réorganisé ? Hé bien parce que j’ai eu la chance de jouer la 3ème et la 4èmesession. Ça aussi c’est plutôt rare. L’explication est simple. Lors de la 3ème édition, une poignée de rôles avait été ajoutée. Il s’agissait de personnages un peu en marge du scénario original. Il m’était donc possible de le rejouer sans risque de connaître les intrigues de mon nouveau personnage. (Et puis aussi, je suis très copain avec les orgas parce que je suis sympa.)
Premier point de cette critique. J’affirme sans crainte que jouer deux fois le même GN, mais organisé par deux équipes différentes, dans deux lieux différents, avec des joueurs différents quand on n’a pas le même rôle, ça fait deux week-ends très différents. Et là je sens que vous ne regrettez pas d’avoir commencé la lecture de cet article.
Plus sérieusement, les personnages des GN JK (ça veut dire Jedi Knight) sont écrits par pôles. Un pôle, c’est un groupe de personnages appartenant à une même famille d’intrigues, et généralement confié au même scénariste. Ça ne veut pas dire que les joueurs d’un même pôle jouent des personnages associés et amis, loin de là. Il est même fort probable qu’ils aient des choses à se reprocher. Comme le jeu se passe d’intrigue générale, vous pouvez très bien être amené à ignorer copieusement ce qui se déroule en dehors de votre pôle. Donc rejouer dans un groupe que vous n’avez pas fréquenté est parfois envisageable, et vous ne vivrez vraiment pas le même jeu.
Je laisse pour l’instant de côté l’aspect technique et logistique car ce sera l’un des points importants de cette critique et je le garde donc pour la fin. Pour l’heure je voudrais parler de l’écriture. Le GN existe donc sur le papier depuis 4 sessions. Il a subi des changements et des corrections bien évidemment. Les backgrounds sont longs (une vingtaine de pages) et ils sont extrêmement romancés. Et c’est bien fait ! La lecture est très agréable, les informations utiles passent bien. Le jeu est bien écrit. C’est encore plus rare que le reste alors je le signale aussi.
Au-delà des backgrounds, il y a toute une série d’événementiels écrits pour faire avancer l’histoire de votre personnage. Et là encore, les idées ne sont pas les premières qui sont passées par la tête de l’organisateur. Le jeu se distingue par des intrigues avec un excellent potentiel dramatique et équilibrées les unes avec les autres. Cependant on déplore qu’après autant de relectures et de réorganisations, il subsiste encore des bugs. Haaa, les bugs ! Si vous êtes joueur signalez-les toujours. Si vous êtes organisateur, tenez en compte pour la fois d’après.
Ce sera tout pour l’écriture mais prenez en note, ça vaut le coup de jouer ce GN ne serait-ce que pour la lecture de la fiche. Le JK2 est sur le papier un très très bon produit. J’insiste encore un peu parce qu’ensuite nous allons parler de la pratique et je vais être moins dithyrambique.
Le GN se déroule à bord d’un vaisseau de croisière. Et sur ce vaisseau, il y a plus de passagers qu’il n’y a de joueurs. Des Pnjs circulent régulièrement en changeant de costumes, pour bien montrer qu’il y a de la vie à bord et que nous sommes plus que 40. En théorie, cette profusion de personnages et le découpage par pôle permet aux Pjs d’éviter de se marcher les uns sur les autres et de ne pas interagir au mauvais moment avec un groupe de joueurs qui est en train de vivre un truc personnel.
On ne risque pas de se marcher dessus dans un GN de ce type parce que le site est très cloisonné également. Le vaisseau est découpé en plusieurs salles et vous pouvez circuler du réfectoire à vos appartements privés, en passant pas le casino et la cantina. Sans compter les autres espaces, vous avez déjà largement assez de place pour tout le monde, et même à 40 joueurs seulement, on est loin de se sentir dans un huis clos.
Les joueurs ont la possibilité d’explorer de nombreux espaces du vaisseau, voire d’en sortir en navette pour aller explorer les environs. Nous reviendrons plus tard sur le fonctionnement de tous ces événementiels, mais il est important de signaler qu’un JK n’est pas un jeu écrit par des feignants. Moi, personnellement, quand j’écris un scénario et que je peux éviter de fabriquer du matériel derrière, je n’hésite pas une seule seconde. Chez Wargs, on en a vu d’autres et ce n’est pas l’idée de construire une foreuse de 25 mètres de long qui va faire peur. (Véridique)
Du coup, on en a pour son argent, même si c’est un GN assez cher, le site est entièrement décoré, parfois de façon extrêmement impressionnante. Pour vous donner envie, je vous laisse vous imaginer en combinaison spatiale et casque, en train de traverser des couloirs en braquant des salles dévastées remplies de fumigènes avec votre laser, lorsque vous tombez sur un nid extra-terrestre entièrement éclairé à la lumière verte. Rassurez-vous il n’y a pas de spoil, mais ça se rapproche sans problème de ce que vous pouvez trouver sur un JK.
Enfin, les costumes et les maquillages, côté organisateurs comme joueurs sont vraiment très chouettes. Et c’est bien normal, l’association a de la bouteille, quant aux joueurs, ils peuvent faire un costume avec les fonds de placard, ce qui laisse du budget pour de superbes accessoires ou un peu de maquillage.
J’en arrive au point central de cette critique maintenant que vous voyez un peu à quoi ressemble un JK : le système de jeu à séquences. C’est assez simple sur le papier et vous avez sans doute déjà vécu ça un jour ou l’autre sur un jeu. Votre personnage décide de descendre dans la soute numéro 54, bien qu’elle soit dépressurisée et envahie d’aliens. Il vous faut alors le signaler à l’organisateur responsable de façon à ce qu’il mobilise les Pnjs et le décor dont il a besoin, qu’il installe tout ça et vous fasse signe de vous diriger au bon endroit. Durant ce laps de temps, vous pouvez donc enfiler votre combinaison spatiale, recharger votre arme, dire adieu à votre femme et fumer un dernier cigare. Ensuite vous découvrez la soute 54 et je ne vais pas revenir dessus, l’endroit est beau, un Pnj sur place incarne votre père que vous croyiez perdu à tout jamais, s’ensuit une scène d’action monumentale et vous quittez l’endroit in extremis avant l’explosion. Bref c’est fabuleux.
Voila, c’est ça le jeu à séquences sur le papier, c’est vraiment génial puisque ça permet d’avoir un nombre de décors impressionnant, des scènes personnalisées, variées, et de représenter tout ça dans un espace restreint puisque le même lieu peut servir à deux scènes différentes.
En pratique, soyons brutalement honnête, ça marche moins bien. Sur ce jeu, le site faisait 6 étages et l’ascenseur est tombé en panne le vendredi soir. Je vous laisse imaginer les retards que ça peut occasionner pour les Pnjs et les organisateurs. Les Pnjs étaient moins nombreux que prévus pour cause de désistements de dernière minute. Les organisateurs couraient partout (ben oui, c’est un GN sur 6 étages). Et le système des séquences devient très difficile à mettre en place.
Pourtant dans ce mic-mac, chaque organisateur rivalise d’astuce pour permettre le bon déroulement du jeu. Untel réutilise un décor en place et déserté pour faire une scène en incarnant lui-même le rôle du Pnj principal. Un autre improvise une scène à 6 heures du matin quand il trouve enfin du temps libre. Mais cela n’est possible qu’aux organisateurs qui connaissent bien le scénario et qui, depuis 4 sessions, sont devenus des experts concernant la gestion de leur pôle de personnage.
Un système à revoir donc, de l’avis même des organisateurs avec lesquels j’ai échangé quelques mails. Mais le Wargs est une association qui sait se remettre en question. J’en veux pour preuve, le changement complet du système de règles qui a eu lieu pour cette session. Le Wargs utilisait un système de règles d’une quarantaine de pages à l’ancienne, détaillant l’ensemble des pouvoirs Jedi par exemple. Le système a été réduit à 4 pages pour cette session, pour s’adapter intelligemment à un public nouveau, plus orienté vers la narration que la simulation.
Comment peut on améliorer le système de jeu à séquences ? La question est ouverte et ferait l’objet d’une série d’articles sous peu que ça ne m’étonnerait pas, mais explorons quelques pistes. Pour organiser un événementiel, il vous faut des pnjs briefés, un décor, et quelqu’un qui connaît le scénario pour ficeler tout ça. Peut-être que la solution réside dans la réutilisation des mêmes éléments ? Le même décor, les mêmes costumes de pnjs et uniquement un briefing différent selon les joueurs qui arrivent en face. J’imagine que les techniques sont nombreuses pour fluidifier tout ça. Augmenter le nombre de pnjs et d’organisateurs doit fonctionner aussi. En tout cas, on leur souhaite bon courage pour la prochaine. On ira peut être faire pnjs pour voir comment ça marche de l’autre côté du miroir.
Jedi Knight 2 , un jeu de Pascal Meunier, Xavier Gavioli, Christophe Trahand, Elizabeth Bates, Vincent Marty
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23 septembre 2011 at 3 h 06 min
Je rejoins totalement l’avis de Baptiste, tant sur les qualités que les défauts du jeu.
Plus que le problème des séquences, c’est un jeu (dans sa dernière mouture, je n’en avais pas autant le souvenir sur la deuxième session) qui est trop “PNJisé”. Je veux dire que beaucoup trop de
trames (surtout coté pègre) nécessitent l’intervention de PNJs donc des séquences. Il eut été préférable à mon avis de déporter beaucoup des intrigues endossées par les PNJs sur des joueurs, de
manière à rendre le jeu entre les joueurs beaucoup plus autonome et dès lors beaucoup moins dépendant de l’instanciation des séquences.
23 septembre 2011 at 3 h 49 min
Perso, je me suis bien éclaté sur ce jeu, malgré l’attente qu’il pouvait y avoir pour certaines séquences (attente bien compréhensible pour les soucis logistiques de dernier moment précisé dans
l’article), et je le conseil vivement à ceux qui n’ont pas encore eu l’occasion de le jouer.
Et je suis plus que partant pour aider à l’orga/PNJisation lors de la prochaine réédition 🙂