Une nouvelle modélisation du GN
Hypothèse de départ
A priori, il existe une variété infinie de types de jeux. Cependant, on retrouve à travers chacun d’eux des caractéristiques dominantes. La théorie LNS (ou GNS), encore appelée “threefold model” ou “modèle triangle” présente les différentes orientations que peut prendre un jeu. Un précédent article de votre blog favori a déjà évoqué ce modèle avec précision. Je n’y reviendrai donc pas.
Visuellement, le modèle prend la forme suivante :
Un autre angle de vue
Dans un jeu, le fonctionnement dépend tout autant du cadre, tel qu’il peut être défini par le modèle LNS, que des joueurs qui y prennent part. D’autres facteurs entrent alors en compte pour que les joueurs s’amusent : ce sont leurs façons de jouer ou de s’impliquer dans le jeu. Ces dernières peuvent à nouveau être définies par trois axes très différents d’orientations ludiques. Ils se divisent de la façon suivante :
La Réflexion : Il s’agit de rechercher tous les éléments qui font appel à la logique et tendent vers l’optimisation. Comprendre les enjeux, chercher les indices et les éléments factuels et enfin résoudre un mystère, une énigme.
L’Action : Il s’agit de s’investir dans le jeu par une capacité ou savoir-faire. C’est une façon de mettre en valeur une faculté physique ou une compétence. On peut par exemple utiliser une arme factice, faire preuve d’endurance, utiliser une technique de fabrication…
L’Interprétation : Il s’agit de traduire une consigne de jeu à travers un ressenti personnel. Elle fait appel à l’imagination et aux expériences émotionnelles vécues par le joueur. Il s’agit par exemple de jouer le comportement donné d’un personnage ou d’exprimer une émotion ressentie dans une situation.
Le modèle prend donc la forme suivante :
Nous l’appellerons la théorie ARI (le sigle est plus facile à prononcer et ne prête pas à confusion).
Approche globale
Quel que soit le jeu, pour bien identifier les mécanismes et les enjeux qui sont à l’oeuvre, il est indispensable de considérer à la fois son type de jeu et la façon dont les joueurs y prennent part.
Ces deux bases se confrontent et l’efficacité d’un jeu dépend directement de l’adéquation entre les deux. Par efficacité, il faut comprendre que les participants s’amusent tous et le plus possible (c’est le but d’un jeu).
Un jeu est une façon de représenter l’homme dans la société. Quelle que soit la forme qu’il prend et la société que le jeu représente, ces deux éléments sont constants. La société correspond à un contexte et une façon d’agir entre les hommes.
Si on représente cette approche pour un seul joueur, on obtient le modèle suivant :
La zone colorée en jaune sur ce schéma représente l’implication du joueur dans le jeu. Il s’agit de son rôle et de sa représentation. Le jeu implique le joueur en lui donnant un rôle, une utilité. Le joueur, lui, s’implique en se représentant dans le jeu. En fonction du jeu, cette implication prendra diverses formes :
Pour un jeu vidéo => un avatar contrôlé par le joueur
Pour un jeu de rôle => un personnage incarné par le joueur
Pour un jeu de plateau => un pion représentant le joueur et dirigé par lui
Pour le jeu politique de notre société => un représentant élu par le peuple (là, je dérape…)
Comme le veut le modèle LNS, le jeu se caractérise par trois orientations différentes qui définissent le type de jeu. De même, le joueur peut se caractériser par les trois orientations du modèle ARI qui définissent sa façon de jouer.
En toute logique, l’implication du joueur est donc influencée à la fois par le modèle LNS et par le modèle ARI.
Le modèle étoile
Le cas du jeu de rôle Grandeur Nature est particulièrement intéressant, car il fond la représentation et le joueur qui la contrôle dans la même personne !
Pour s’amuser, le joueur doit donc apprécier le type de jeu, ainsi que la façon d’y prendre part. Autrement dit, le fond, c’est à dire le but recherché par les organisateurs, mais aussi la forme, c’est à dire l’engagement du joueur.
Le jeu de rôle implique donc de mettre en adéquation le fond et la forme du jeu : l’engagement du jeu et l’engagement du joueur.
Il est alors logique de coordonner les deux modèles présentés plus haut. Cela donne la représentation suivante :
Par définition, la réflexion et l’action se rapprochent plus du type ludisme. Il en va de même pour la réflexion et l’interprétation par rapport au narrativisme, ainsi que pour l’action et l’interprétation par rapport au simulationnisme. Pour ces raisons, la superposition se fait selon le schéma ci-dessus.
A noter : on regrettera que cette forme ne soit pas un pentagrame ;o) mais peut être s’agit il d’un symbole cabalistique…
Dans un prochain article, nous développerons l’intérêt de ce modèle, ses applications et ce qu’il peut remettre en question…
Lire la suite du développement de ce modèle.
Pierre-Olivier BLONDONT
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6 mai 2011 at 3 h 02 min
Une preuve de plus que la théorie du GN s’inscrit dans le complot judéo-maçonnique…
Plus sérieusement, merci Olivier pour cet article intéressant !
Te serait-il possible de détailler ton choix dans les associations LNS/ARI ? Un peu par curiosité, et un peu parce que j’ai l’impression qu’il remet en cause la sacro-sainte universalité de ma
théorie fétiche ;).
6 mai 2011 at 9 h 21 min
J’ai du mal à répondre avec certitude à ta question. En tant que joueur et surtout, actuellement, je dirais que j’accorde le plus d’importance à l’interprétation et à la narration. J’ai envie de
vivre le jeu par l’émotion. En tant qu’orga par contre, il me semble important de mélanger assez équitablement tous les aspects.
8 mai 2011 at 0 h 05 min
je croyais que la question de hoog portait plutôt sur le fait de choisir A, R et I et des les avoir associé à L, N et S de cette façon plutôt que d’une autre. en gros, pourquoi avoir mis les deux
triangle comme ça et pas inversé ? Ce qui, je crois, s’éclaire avec la suite de cet article.
8 mai 2011 at 2 h 44 min
ok…
Ce qui m’a semblé clair pour choisir cet assemblage des triangles, c’est que Le “Ludisme” est très éloigné de “l’Interprétation”. Le fait de résoudre une énigme (Réflexion) ou de réussir un combat
(Action) se rapproche bien plus de la confrontation (Ludisme) que le fait de ressentir une émotion (Interprétation). cette dernière n’est pas quantifiable et ne permet pas de se démarquer des
autres joueurs.
Ensuite, j’ai positionné “l’Action” entre “Ludisme” et “Simulationnisme”, car le “Simulationnisme” est très concret (comme l’Action) et ne nécessite de mystère à élucider tandis que “l’Action”
permet de faire vivre la scène.
Comme l’a dit Baptiste, un prochain article détaillera bien plus clairement ce qui rapproche ou éloigne ces aspects du jeu
13 mai 2011 at 8 h 33 min
OK, merci pour ces précisions ;). C’est effectivement le positionnement relatif des triangles qui me tracassait. J’attends la suite de l’article avec intérêt !