Cet article a été rédigé dans le cadre de l’édithon 2014. Il s’agit d’un des articles de retour sur l’expérience Labo-GN.
Labo-GN était une réelle réussite, un très beau moment de partage, d’échange, d’égalité entre participants, qu’ils soient organisateurs, joueurs ou simples curieux. Une expérience d’utopie sociale (comme le souhaitaient les organisateurs du projet) et de cohésion de groupe. Cela aurait pu être bien autre chose, il me semble, et l’alchimie n’aurait pu fonctionner sans les quelques règles, simples et ô combien efficaces pour dynamiser, favoriser et pérenniser la cohésion de groupe.
Labo-GN aurait pu être un grand concours de bistouquettes entre organisateurs de différentes associations qui se lanceraient des duels à base de longs palabres d’ego surdimensionnés. Bien conscients de leurs longues expériences d’organisateurs, nombreux auraient pu expliquer pourquoi et comment ils détiennent la vérité, quelle est LA bonne méthode et comment leurs concepts de GN a changé le paysage de la communauté. Et Labo-GN aurait pu être un espèce de guide de la bonne pensée et de la bonne action dans le bon monde du bon GN.
Mais en aucun cas durant la longue semaine de Labo-GN, ce genre de comportement ne se présenta. Voilà pourquoi :
Parce que c’était une volonté des organisateurs…
Dès l’accueil à Labo-GN, dès la première intervention, les organisateurs ont bien insisté sur la volonté de créer un lieu de partage, d’égalité et même d’utopie (pour reprendre les termes de certains).
C’est donc des discours mesurés, tout en nuances, sans jamais critiquer et sans suffisance qui prennent place et qui traitent d’une vision très adulte du paysage associatif et du GN ainsi que des personnes qui le constituent.
D’autre part, les organisateurs ont souvent rappelé les règles en expliquant les intérêts pour le plus grand nombre, pourquoi il est bon de s’ouvrir aux autres, d’écouter pour de vrai, sans vouloir, comme nous le faisons peut-être trop souvent, convaincre à tout prix.
La bienveillance était le fil rouge du week-end. Veiller à ce que tout se passe bien. Un terme et une intention que l’on ne trouve sans doute plus assez dans un cadre professionnel et par extension, malheureusement, associatif.
Cette volonté sans cesse affichée, expliquée et ré-expliquée a permis à la semaine de se dérouler merveilleusement bien et de faire comprendre aux participants que Labo-GN n’était pas un lieu de formation mais bien de partage, et que les apports de chacun étaient légitimes.
De plus, une semaine avec un cadre fort mais bienveillant et une grande liberté a permis aux participants de s’emparer de la formule et de proposer des ateliers, des jeux, et de rendre la limite entre organisateurs et participants encore moins perceptible.
… aidée de la politique de la chaise vide…
Une des règles simples de labo-GN était de laisser systématiquement, que ce soit durant les tables rondes, les discussions ou à chaque moment de la journée, une chaise vide pour permettre à quiconque de pouvoir prendre place dans la conversation. Ce principe qui peut paraître simpliste d’un premier abord entraine énormément de choses sur le groupe.
Les personnes qui échangent sont conscientes que n’importe qui peut s’insérer dans la conversation, elles tiennent donc compte du groupe dans son ensemble, cela évite les critiques trop faciles sur les absents, sur les autres qui ne sont pas dans le groupe et cela a donné des sujets de conversations réfléchis, modérés et très intéressants.
Il était demandé à chacun de briefer rapidement une personne qui s’insérait dans une conversation. Cela permet de lui montrer qu’on a remarqué sa venue, qu’on l’intègre intellectuellement et physiquement, et lui faire une petite synthèse sur le débat en cours. Dès qu’une personne prenait la place de la chaise vide, elle rajoutait une place, perpétuant ainsi ce principe d’ouverture.
Cette chaise vide symbolisait l’ouverture d’esprit d’un groupe aux autres et a permis, je pense, à de nombreuses personnes de débarquer dans une conversation sans aucune gêne ni personnelle ni pour le groupe.
… et d’un formidable lapin…
Le principe du lapin est simple : lorsqu’une personne lève la main en faisant le signe V avec les doigts (les oreilles du lapin) la communauté fait de même et s’impose le silence. Le signe du lapin veut simplement dire « vos gueules, j’ai une annonce à faire, écoutez moi » sans citer personne. Ce principe permet d’avoir rapidement l’attention de tous sans avoir à élever la voix ou se faire remarquer, il permet facilement de faire des annonces et d’informer un groupe de personnes. Il laisse aussi à tous la possibilité de pouvoir prendre la parole sans avoir la légitimité ou le charisme nécessaire pour se faire entendre.
Ce principe permet aussi, inconsciemment, de laisser une place à la prise de parole devant le groupe. Même si on ne le fait pas, on sait qu’on peut faire une annonce et qu’elle sera écoutée et entendue.
Les quelques écueils du lapin sont des annonces qui peuvent devenir trop nombreuses et ne pas être « à propos » mais la principale frustration fut le nombre de conversations enflammées et intéressantes coupées par ce silence et ces annonces.
Malheureusement, il n’existe pas de système parfait et malgré ces quelques points négatifs rapidement recadrés par les organisateurs, le lapin permit d’obtenir durant toute la semaine une écoute et une attention de chaque participant aux moments nécessaires.
… mais aussi de débriefings réguliers…
Le débriefing de chaque soir sous la tutelle d’un organisateur et en petit groupe permettait de faire le point de la journée. Je pense qu’il a permis aux organisateurs de prendre la température du groupe en général, des attentes et des joies de chacun.
Pour les participants, il laissait un moment d’écoute, de lien avec les organisateurs et de retour sur soi. Cela permettait à chaque participant de faire le point avec lui-même, « qu’est-ce qui m’a plu dans la journée », « qu’est-ce que je retiens », « où j’en suis par rapport à mes attentes de la semaine », etc.
Ce débriefing montrait aussi à chacun les activités / conférences / jeux réalisés par les autres participants et donnait souvent lieu, juste après le débriefing, à des échanges entre les personnes présentes ou à des propositions d’ateliers.
Il ne faut pas voir ces débriefings comme des remontrances à l’équipe organisatrice, mais bien comme un moyen pour chacun de faire le point, de se situer dans le groupe, dans les ateliers proposés et dans les choix des activités des jours suivants, et que chacun trouve sa place dans l’initiative « Labo-GN ».
… et de participants très réceptifs.
Pour finir, toutes ces règles n’auraient pu permettre cette cohésion rapide du groupe sans un respect et une accroche très rapide de la part des participants. Au fur et à mesure de la semaine, les participants s’imposaient les règles et se reprenaient en cas de non respect. À aucun moment, elles ne furent remises en question, même si chacun avait son avis sur la question. Tout le monde a joué le jeu et c’est ce qui fit de Labo-GN un endroit d’égalité, d’écoute, d’attention, de bienveillance, de partage, de prise en compte de l’autre et de ses attentes, de ses idées mais aussi de prise en compte de soi.
Ces méta-techniques de gestion de groupe ont permis à mon sens de dynamiser la cohésion du groupe, de le rendre cohérent et convivial, ouvert d’esprit, tout cela en très peu temps comparé à une formation de groupe “standard”, et a aussi permis de laisser de côté les critiques et le « geekisme » souvent trop fréquents sur ce genre de manifestation.
Lionel COURTOIS
Derniers articles parLionel COURTOIS (voir tous)
- Ecriture instinctive et collaborative appliquée au GN - 15 décembre 2014
- Les méta-techniques de cohésion de groupe - 8 décembre 2014
8 décembre 2014 at 7 h 18 min
Le mieux c’est de remplacer le lapin par un gros Bisounours.
Mais c’est pas facile de faire des oreilles de Bisounours !
Donc le lapin c’est pas mal en fait.
8 décembre 2014 at 10 h 39 min
Le lapin c’est parfait pour les orgas de GN. Non seulement c’est moins bruyant que de se péter la voix, mais c’est beaucoup plus rapide. Chaudement recommandé !
15 décembre 2014 at 10 h 06 min
Qu’est ce que le “geekisme” ?