Titre du jeu de rôle Grandeur Nature : « Le Cycle des Éternels – Acte I »
Association organisatrice : Acta Es Fabula
Localisation : Aquitaine – Dordogne (24) – Saint Astier – Château de Puyferrat
Date du jeu : Du vendredi 19 septembre (21h) au samedi dans la nuit
Nombre de Pjs : 130
Nombre de Pnjs : 30
La jeune association Acta es Fabula s’est donnée comme défi d’organiser pour leur premier GN, le cycle des Éternels, un jeu dans l’univers riche et baroque du jeu de rôle Agone (Multisim Editions), lui-même issu du roman de Mathieu Gaborit “Les Royaumes Crépusculaires” (Mnemos).
Dès la preview publiée sur Electro-GN : http://www.electro-gn.com/6693-preview-de-gn-le-cycle-des-eternels, les organisateurs se sont montrés très ambitieux et ont su décrire parfaitement leurs intentions pour plonger 140 joueurs dans leur univers de GN, au château de Puyferrat (St Astier 24).
Pour ma part, je n’avais jamais eu l’occasion de jouer de GN med-fan et pourtant cela fait une petite quinzaine d’années que je joue et que j’organise des GN. En m’inscrivant sur ce GN construit comme un GN medfan, je me suis dit qu’il vaut mieux tard que jamais pour découvrir ce genre ludique. Également parce que je joue peu depuis ces dernières années, je choisis mes GN avec soin, et celui-ci m’avait tapé dans l’œil grâce à une communication parfaitement maîtrisée.
La qualité de la preview et la disponibilité des organisateurs pour répondre à toutes mes questions avant de m’inscrire ont su me rassurer sur le fait que je savais où je mettais les pieds.
Pour finir, l’univers baroque d’Agone, son approche des arts et des intrigues ont su également me convaincre que j’allais passer un bon GN.
Avant le GN
Les documents de jeu fournis sont arrivés un peu en retard à mon goût, car il y avait beaucoup de matière à digérer, surtout quand on connaît peu l’univers. Je reviendrai sur ce point plus tard dans la critique. Ayant subi des désagréments comme le hackage du site où se trouvaient les documents en téléchargement, ainsi qu’une vague de désistements intempestifs, on peut supposer que les organisateurs étaient occupés à autre chose.
Premier point notable, et pas des moindres puisqu’il contribue à la réussite du GN, c’est l’âge moyen des joueurs. En voyant nos têtes sur la fiche de groupe, je me suis aperçue que les joueurs de mon groupe étaient des trentenaires comme moi (voire plus pour certains). Cela s’est confirmé via des échanges de qualité par mail avant le jeu et pendant le jeu.
Immersion dans l’univers
JDR vs GN
Nul besoin de connaître le monde d’Agone pour y participer avaient annoncé les organisateurs. Tant mieux, car à part une murder, la lecture du roman le Souffre-Jour et les échos d’amis rôlistes, je n’avais que peu de connaissances de l’univers du jeu de rôle.
Au niveau du personnage, mes souhaits ont été respectés là aussi, je n’avais pas besoin de rattraper mon manque de culture sur le sujet.
Ce qui était appréciable était le fait que l’univers d’Agone soit bien retranscrit dans le GN. Saisonnins, vocabulaire, groupes de jeu (efforts sur les costumes ), documents avant jeu, magie et intrigues nous ont plongés dans l’univers d’Agone tout le long du week-end.
Cet effort d’immersion est remarquable dans le sens où il n’y avait aucun doute sur le fait que nous étions dans le monde d’Agone, la maîtrise de cet univers par les organisateurs aidant. Cela m’a donné envie d’en savoir plus sur ce jeu, et pourquoi pas de faire une partie de jeu de rôle en attendant le prochain opus.
Dans ce type de GN qui s’inspire très fortement du JDR, l’écueil est bien entendu que les PJ afficionados du JDR se posent des questions existentielles lors du GN (comparaison inévitable avec le JDR), ou qu’on ait l’impression que certains joueurs ont vraiment beaucoup d’informations comparé aux documents fournis avant le jeu. Ce dernier cas peut créer une certaine méfiance vis-à-vis des autres personnages car en savoir autant peut créer de la suspicion.
Même s’ils étaient rares, ces cas ont forcément été présents lors du GN, mettant un peu mal à l’aise les joueurs plus néophytes.
Ce que l’on peut regretter c’est cette sensation que certains organisateurs fans de jeu de rôle se sont peut être un peu trop lâchés sur certains PNJ ou intrigues venant probablement du monde d’Agone, déséquilibrant la réussite de cette immersion dans l’univers.
Je dirai juste que si prochain opus il y a, il serait mieux de GNiser des pendants du JDR, quitte à peut-être les réinterpréter ou les réécrire d’une manière à les rendre plus ancrés dans un contexte de GN.
De mon point de vue, ce qui manque à ce GN pour être une réussite totale est aussi un effort sur la scénographie. À mon goût, elle était insuffisante car justement le monde d’Agone a quelque chose d’étincelant, baroque, mais aussi sombre et mystérieux. Tout cela j’ai eu du mal à le retrouver dans la scénographie du GN. Il ne serait pas étonnant qu’un manque de temps en soit la cause.
Le travail des organisateurs sur l’immersion dans l’univers a heureusement comblé les manques dans la scénographie utilisée lors du jeu.
La force et la réussite de ce GN viennent clairement de la cohérence du scénario et ses différentes ramifications. Nous étions tous sur le même GN, les informations que nous avons partagées se répondent sans problème les unes aux autres. Même s’il y a quelques bugs venant du scénario, les joueurs ont été fair play pour passer outre et faire avancer le jeu.
La force et la réussite de ce GN tient également, je tiens à le souligner, à la bonhomie des organisateurs, des PNJs et des joueurs.
Le Clap de fin ou le couac de fin
Tout le monde le sait, la fin de GN c’est toujours compliqué. Le couac de fin sur ce GN a vraiment été frustrant pour les joueurs dont je faisais partie qui étaient prêts pour le final. Soit au total 40 PJ au taquet, prêts à en découdre et organisés pour atteindre l’objectif, et quelle déception pour eux lorsqu’ils ont entendu le PNJ rattaché à l’intrigue finale leur dire “ vous allez devoir attendre 45-60 min pour le faire” !
Vous le voyez venir… les joueurs qui se découragent, qui se dispersent et le peu qui restent attendant dans la frustration de ne pas pouvoir agir.
Il est vrai que la scène finale allait devoir être avancée car les pjs en question ont dû surprendre les organisateurs par le fait d’avoir réussi cette quête. Là aussi, si prochain opus il y a, quand 40 joueurs sont prêts, il faut éviter de les faire attendre car si les joueurs peuvent comprendre que la mise en place d’un scène prenne du temps, il est par contre incompréhensible et frustrant de devoir attendre une heure.
Pour finir, la fin en tunnel manquait clairement d’un groupe d’opposants ou de pression extérieure. En effet, la dizaine de joueurs restants ont forcément attirés l’attention et ont entraîné dans leur sillage la majorité du GN qui ne faisait plus grand chose.
Ce qui est positif, c’est que tout le monde a pu profiter du final qui était très spectaculaire, sans que personne ne soit venu empêcher ces pj de faire ce qu’ils avaient à faire.
Pour le final, ça manquait un peu d’adrénaline 😉
Suite au débrief, nous saurons s’il y aura un deuxième opus en 2016. Vu le succès de ce premier opus, je me doute qu’il faudra peut être se battre pour s’inscrire.
Conclusion
Acta es Fabula a-t-il réussi son premier GN?
Oui, bien sûr, car ils ont eu l’intelligence de s’entourer de partenaires pour gérer l’auberge, la taverne, la photographie etc., de se faire prêter du matériel, et ils ont pu compter sur des PNJ au taquet pour mettre en œuvre ce GN.
Avec une standing ovation en fin de GN, il faut qu’ils sachent garder dans le rétroviseur tous les points améliorables évoqués dans cette critique et sûrement d’autres effacés pour nous les joueurs par la magie du GN.
Est-ce que je signe pour le deuxième opus ? Bien sûr!
Crédits photos : GN de Merde
Lire la critique de Muriel sur ce jeu.
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20 octobre 2014 at 12 h 55 min
Salut Graziella 🙂
Merci pour ton compte-rendu.
Un point m’as surpris : ta remarque sur l’âge des participants. Trouves-tu vraiment qu’un joueur de 35 ans joue mieux qu’un autre de 25 ? Ou ai-je mal compris ?
20 octobre 2014 at 19 h 27 min
Salut, merci d’avoir pris le temps de lire cette article !
En général, je ne pense pas qu’un joueur de 35 ans joue mieux qu’un joueur de 25 ans.
Quand j’ai écrit la critique, c’est plus un truc plus spontané du genre “on a passé un bon moment entre vieux cons et c’était bien;)” Le côté expérimenté de ce groupe de joueurs a forcément ajouté une plus-value concernant la qualité de jeu en terme de roleplay, orientations de jeu, logistique etc…
Avec un groupe de joueurs plus jeunes, ce weekend aurait été forcément différent, pas mieux, pas moins bien, juste autre chose.
20 octobre 2014 at 20 h 00 min
Merci pour cet article, il avait l’air super intéressant surtout pour un fan comme moi de l’oeuvre de Mathieu Gaborit. Vous gériez comment les danseurs ? (Cad pour les néophyte les petites créatures qui permettent d’utiliser la magie)
Sinon, pourriez vu expliciter un peu plus en ce que vous désigner par les écueils du jdr, vous voulez dire les références directes au background jeu de rôle Agone avec des joueurs tout à fait au fait des secrets de l’univers et ne sachant pas rester dans leur role de personnage non initié ?
Par rapport aux pnj “lachés” , cela signifie que les orga ont décidé d’intégrer des personnages directement issus du roman ou du jeu de rôle ? (Choix effectivement délicat voir casse gueule à gérer en jeu)
En tout cas 130 pj/30 pnj pour ce type d’univers avec donc un ratio de plus de 4 pour un, c’est chaud à gérer pour un med fan. (Chez nous en Belgique, dans les gn medfan d’une centaine de pj, la base moyenne est de 2,5/3 pnj pour un pj )
Cela explique peut être le couac de la fin même si c’est une erreur d’orga débutante classique. (Toujours anticiper le fait que les pj plient un scénar/un arc scénaristique dans une période de temps allant de tout de suite à jamais ^^)
20 octobre 2014 at 20 h 01 min
Pardon 2,5/3 pj pour un pnj
20 octobre 2014 at 23 h 40 min
Les danseurs : http://www.lecycledeseternels.fr/creation-dun-danseur/
Il n’y avait pas de PNJ issus de Dramatis Personae ou directement du jdr/roman. Janus, seul, vit une courte apparition, dans une scène qui ne laissait pas la place à la discussion.
Le “couac de fin” décrié par Graziella n’a au final, à mon sens, rien à voir avec l’inexpérience du PNJ concerné (55 ans dont la moitié passé au service du Jeu avec un grand J). Il s’est agit d’une erreur de jugement dans la gestion du rythme et de l’avancée de notre trame. Nous avons ouvert des portes trop vites, de peur de ne pas arriver à tenir notre rétro-planning. Entraînant les joueurs face à un choix, qu’ils ne virent pas (de notre faute). Face à ce saut imprévu dans le temps, il fallu réagir vite.
45 minutes c’est le temps qu’il faut pour récupérer 30 personnes sur 5 sites différents, pas costumés et préparer avec 3h d’avance une scène un peu chargée en son et lumière.
Ce que j’en retiens : il ne faut pas mélanger vitesse et précipitation. Mais si ces 45 minutes ont pu être longues pour certains joueurs, je vous jure qu’on les a optimisé au poil de cul en coulisses 🙂
Et suite à l’enquête de satisfaction et au questionnaire de suivi, la scénographie en elle-même n’est pas un point qui ressort comme problématique. Au contraire. C’est effectivement plus la gestion du rythme qui a été relevé. Trop rapide, parfois. Trop lente à d’autres niveaux.
21 octobre 2014 at 8 h 26 min
Au sujet des joueurs et PNJ tenants des secrets de l’univers, j’en parle un peu dans ma critique.
L’idée (que j’ai trouvé personnellement plutôt bonne) était de faire correspondre les connaissances du joueur et du personnage, en ajoutant certains PNJs “mystiques” (des créatures magiques de l’endroit) pour faire relais de la backstory et des secrets du monde. Les aides de jeu étaient fractionnées par thèmes (Genèse, Magie, Démonologie, Inspiration) et n’étaient accessibles qu’aux joueurs concernés. Certains personnages avaient donc des connaissances plus importantes, et parmi ceux-là une poignée de joueurs experts du JdR, et pouvaient avoir d’avantage vocation à se poser des questions existentielles en effet.
Autant je veux bien comprendre les objections de Graz à cet égard, autant je sais aussi que d’autres m’ont dit avoir apprécié de pouvoir se voir expliquer ces éléments EJ, au moment où le contexte l’exigeait.
Là dessus c’est un problème qui ne devrait plus se poser puisque la fin du GN mettait fin à la mascarade, et donc à ces différents niveaux de connaissance et culture du secret. Dans la perspective d’une suite, donc, tout le monde sera au même niveau… et je pourrais remiser mes cours de cosmogonie 🙂
21 octobre 2014 at 10 h 11 min
Pink, je parlais de l’organisation qui fait ici son premier gn pas du pnj (Ce qui est concerné ici concerne la création du scénario et de sa gestion en jeu. )
Muriel, j’avais jamais pensé à faire concorder les connaissances des pj et de leur personnage, c’est une super bonne idée en fait 😉
21 octobre 2014 at 23 h 05 min
Le “couac” de fin décrit de ton point de vue comme une attente, fut pour d’autres joueurs le contraire : accélération voire annulation de scènes, quêtes inabouties…
Au delà de la quête générale sur laquelle votre groupe était investi, il y a avait une grande richesse dans le jeu intra-groupes, les sujets annexes voire anecdotiques mais très ludiques.
Décider de modifier une time-line sur laquelle sont calés de nombreux organisateurs et PNJs n’est pas simple. Le faire dans un délai d’une heure est tout simplement impossible parce que certaine scène sont lancées. C’était mon cas, et quand le vin est tiré… Il faut jouer ! 🙂
22 octobre 2014 at 12 h 29 min
Je suis majoritairement d’accord avec les avis des uns et des autres.
– Effectivement, la scénographie manquait un peu à mon goût, sans que ce soit non plus dramatique pour le GN.
– D’après mon ressenti, l’habillage était certes baroque, mais la substance du GN était med-fan. Ce n’est pas un jugement de valeur, hein : qu’importe le flacon, pourvu qu’il y ait l’ivresse. Et, dans mon cas, l’ivresse y était.
– J’ai aussi ressenti le manque d’antagonisme, pas seulement à la fin, mais tout au long du GN. C’est peut-être la plus grosse critique que je ferais au scénario -qui était très sympa par ailleurs.
– Je suis aussi tout à fait d’accord avec les points positifs que les autres ont relevés : une bonhomie générale vraiment très agréable (peut-être à l’origine du manque d’antagonisme ?), un scénario bien ficelé, une organisation générale plutôt bonne, une grande disponibilité des orga… Bref, je re-signe pour 2016 avec grand plaisir !
12 mai 2015 at 16 h 50 min
Bonjour à tout le monde.
En tant que participant à ce GN (en photo sur l’article de Graz), j’assume pleinement le fait de dire que ce fut un excellent GN (le meilleur auquel j’ai participé en 2014) avec plein de gens intéressants, d’intrigues et de complots en tous genres. Mais aussi avec ce caractère fantastique/magique qui est à mon goût l’élément essentiel à l’univers de Mathieu Gaborit.
Alors certains indiquent un manque de style baroque. Il est évident qu’un décors baroque est difficile à mettre en oeuvre d’autant plus si on ne possède pas un village entier à décorer. J’ai trouvé, pour ma part, que les éléments du décors et les touches apportées par les orgas et pnjs avaient justement ce côté baroque mais pas outrancier (sauf certains démons qui se reconnaîtront mais c’était voulu). Je trouve en effet que la finesse a été un petit plus que l’on trouve rarement dans les ambiances de GNs.
Pour ce qui est des connaissances/compétences, là aussi il n’est pas simple de limiter les joueurs face à un monde dans lequel certains ont déjà joué sur table et/ou ont déjà lu t relu les livres de Mathieu Gaborit (ce qui est mon cas). Là encore, le choix du personnage était plutôt libre. Pour ma part, connaissant bien l’oeuvre “Abyme”, j’ai décidé d’interpréter un abymois. Cela a permis aux orgas de s’appuyer aussi sur les connaissances des joueurs pour approfondir le rendu de la richesse de cet univers sans avoir à fournir 50 pages de BG par personne. Après, c’est un GN et il y a des incohérences dans les ressentis. C’est inévitable.
Tout ça pour dire qu’en 2016 je signe pour la suite !
Merci à GN de Merde pour leur présence subtile 😉