Réseau de personnages par archétypes
Il paraît qu’on a déjà raconté toutes les histoires et qu’on se contente aujourd’hui d’imiter. C’est sans doute faux, mais cette impression vient du fait que la plupart des histoires revisitent un mythe universel connu. Matrix, c’est le Christ. Hulk c’est Mr. Hyde. Dr house, c’est Sherlock Holmes. Hebus c’est Obélix.
Les mythes fondateurs sont une matière première, à façonner pour créer des histoires modernes. On y pioche ce qu’il faut de codes communs pour raconter des histoires qui parlent à nos contemporains. Il en va de même pour les personnages. L’archétype est la base psychologique fondamentale du personnage. Il a une résonance particulière pour le public et définit rapidement la façon dont le personnage interagit avec la société. Attention toutefois : si on ne travaille pas à l’individualisation de cet archétype on se retrouve avec un… stéréotype.
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Carl Jung est un des pères de la psychologie analytique. Il a proposé un modèle de types de personnalités avec leur côté bénéfique et leur tendance négative. Aujourd’hui, ce modèle est utilisé dans diverses techniques de management, par les scénaristes américains pour relire un scénario et d’une manière générale par les gens qui aiment bien les petites cases (comme ma petite sœur).
En GN : Pour ceux qui pensent qu’on a là un truc chiant et inutilisable, je vous donne un exemple d’utilisation de l’outil. Le scénariste 1 dit : ce personnage me semble un peu léger. On devrait peut être lui ajouter une intrigue ? Oui, mais quoi ? Et bien cherchons à quel archétype il correspond et voyons si nous avons exploité sa zone d’ombre.
– Le roi ou le père
Dirige sa famille ou son peuple avec sagesse et détermination pour le bien de chacun.
Zone d’ombre : peut oppresser son peuple ou sa famille en se coupant de toute émotion et en le faisant pour son plaisir.
– La reine ou la mère
Tisse un cocon protecteur où les membres de son peuple ou de sa famille peuvent s’épanouir.
Zone d’ombre : peut créer un cocon-prison et utiliser l’affection et la culpabilisation pour son propre plaisir.
– Le mentor
Transmet un savoir pour que les autres s’épanouissent.
Zone d’ombre : peut abuser de la confiance des disciples pour transmettre une pensée morale faussée.
– Le guerrier
Combat pour le bien.
Zone d’ombre : peut combattre pour la force qu’il admire et détruire le faible.
– Le magicien / l’escroc
Peut rendre visible la réalité que les autres ne voient pas via ses pouvoirs ou ses mots.
Zone d’ombre : peut faire mentir la réalité pour manipuler et détruire.
– L’artiste
Montre ce qui ne fonctionne pas. Génère des paradoxes.
Zone d’ombre : peut devenir un tyran qui utilise le paradoxe en montrant qu’il est possible de tout contrôler.
– L’amoureux
Donne à l’autre l’attention dont il a besoin.
Zone d’ombre : peut disparaître au profit de l’autre ou au contraire le forcer à rester dans l’ombre.
– Le rebelle
Sort du système et le combat.
Zone d’ombre : peut ne pas savoir comment construire autre chose et se contente donc de détruire (c’est un revers quasiment systématiquement exploité).
2. Individualiser les personnages dans le réseau
Cela se fait au travers de plusieurs étapes. Mais pas un personnage après l’autre. Chaque personnage s’individualise lors d’une comparaison avec le reste du groupe. Et la comparaison se fait autour d’une réflexion sur le débat moral central de l’histoire. Il y a plusieurs opinions et options autour d’un problème moral soulevé par votre concept d’histoire. Appliquez-les aux personnages.
1/ Écrivez votre prémisse. De quoi parle votre histoire ? Quel problème moral est au cœur de votre scénario ? Vous allez devoir créer un réseau de personnages autour du héros.
Chacun de ces personnages aura pour fonction de faire avancer votre héros pour qu’il gère ce problème moral que vous exposez dans la prémisse.
2/ Comparez votre héros à tous les autres personnages et tous les personnages entre eux. En fonction de ces paramètres, notez :
Faiblesse
Besoin (psychologique pour lui et moral vis-à-vis du reste du monde et de sa place)
Désir
Valeurs
Pouvoir, statut et capacités
Comment fait-il face au problème moral ?
3/ Comparez en premier lieu le héros et ses adversaires. Car, encore une fois, leur conflit est une ressource première pour faire avancer l’histoire.
4/ Comparez ensuite les adversaires entre eux et avec les autres personnages, etc.
En GN : Vous avez probablement déjà tourné et retourné dans votre tête tous les personnages de votre GN. Qui sont-ils ? Que peuvent-ils faire dans cette situation ? Que se passe-t-il si machin parle à bidule ? Cette méthode est très organisée mais vous permettra une relecture finalement assez naturelle. Vous vous posez probablement souvent toutes ces questions (juste de façon plus brouillonne).
3. Créer votre héros
Définir un personnage intéressant, à partir de rien, est extrêmement délicat. Un personnage n’est intéressant que dans ses actes et face à d’autres personnages. C’est pourquoi le fait d’avoir commencé par le réseau devrait vous aider à définir ce personnage.
En GN : On a souvent une démarche de ce type puisque qu’on écrit tous les personnages ensemble et pas les uns après les autres.
Étape 1 : caractéristiques du héros
Fascinant
« Pourquoi un personnage sur 30, en GN, a perdu la mémoire ? »
Hollywood dit que le plus important c’est que le personnage fascine. Souvent par son mystère. On ne sait pas tout de lui.
En GN : Aïe c’est compliqué. Mon joueur ne devrait-il pas tout savoir du personnage qu’il incarne ? Sauf s’il est amnésique !
Plus largement, le personnage peut ne pas tout savoir de sa vie et chercher la vérité sur un mystère qui gravite autour de lui sans avoir totalement perdu la mémoire. Il peut également se mentir à lui-même. Et on connaît quelques jeux où le joueur ignore une partie du personnage qu’il incarne, mais nous n’aurons pas le temps d’en parler ici. Retenons simplement que l’on peut très bien apprendre des choses sur soi-même, n’est-ce pas ?
Identification
Le cinéma hollywoodien, contrairement aux idées reçues, ne dit pas qu’on s’identifie au personnage s’il s’habille comme nous, parle comme nous et est de la même couleur que nous (bon, ça peut aider). Non, la vérité (et Disney en est un très bon exemple), c’est qu’on s’identifie avant tout au désir et aux besoins du héros. Et si le personnage est différent de nous sur tous les autres aspects, ça nous permet justement d’isoler nos points communs et de mieux les comprendre (pensez aux films Pixar, où l’on s’identifie sans problème à McQueen qui est tout de même une bagnole qui parle. Vous me direz que Rubber a fait mieux depuis, puisque le héros est un pneu).
Empathie
Truby met en garde, dans son modèle, sur la différence entre l’empathie et la sympathie. La sympathie peut aider le public à vouloir que le héros accomplisse son objectif, mais certaines histoires mémorables racontent l’aventure d’un héros antipathique. Le héros peut agir de façon immorale, mais si ses actes sont motivés, le public peut continuer à suivre. Comprendre la cause de l’action… c’est cela l’empathie dont on parle ici.
Besoin moral et psychologique
Hé, on en a parlé 34 fois déjà. Vous savez pourquoi ? Parce que c’est indispensable. La puissance émotionnelle d’une histoire vient du fait que le héros a un besoin psychologique (qui le concerne lui et lui seul) et un besoin moral (qui concerne sa façon de se comporter avec le reste du monde). On va y revenir, pour en parler au moins 35 fois avant la fin.
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